La régionalisation en Amérique latine et dans les Caraïbes
Date limite : 1er octobre 2023
Mise en perspective
En Amérique latine et dans les Caraïbes (Région ALC) les appels à la solidarité et à l’intégration sont depuis longtemps des leitmotivs du discours politique. Dans les années 1950 – 1970, dans le cadre de politiques nationales d’industrialisation par substitution (ISI), l’intégration prit la forme d’une coopération régionale, de l’ouverture ordonnée des marchés et du partage de la production. Confrontées à des rivalités politiques et à la faible complémentarité des économies, la plupart de ces initiatives furent par la suite sinon abandonnées, du moins largement modifiées dans la foulée de la crise de la dette, au profit de la multiplication d’accords régionaux. De nombreuses institutions régionales ont été créées par additions successives, en Amérique centrale, dans les pays andins, dans les Caraïbes insulaires…, certaines organisations adoptant un caractère nettement idéologique pour combattre l’impérialisme (Alliance ALBA). S’inspirant de l’Union Européenne, les pays du Cône sud choisiront une approche communautaire (MERCOSUR).
Mais force est de constater que la relation inter-gouvernementale l’emporte le plus souvent sur les mécanismes communautaires, le MERCOSUR connaissant des hauts et des bas, au rythme de changements d’orientation politique et des difficultés économiques. D’autres pays, notamment les pays andins, privilégieront une ouverture compétitive contractuelle et le rapprochement avec l’Amérique du Nord et surtout les États-Unis, à l’instar du Mexique qui avait rejoint l’ALENA. À la suite des événements du 11 septembre 2001 et de l’échec de la Zone de Libre-Échange des Amériques (ZLEA) promue par les États-Unis, ceux-ci se sont détournés de l’Amérique du Sud pour se concentrer sur leur voisinage (Amérique centrale et Caraïbes). Ce n’est que récemment, sous l’administration Biden, que l’on perçoit une volonté de réactiver les anciennes relations, sous la forme d’un nouveau partenariat sélectif (Americas Partnership for Economic Prosperity), encore mal défini. Par ailleurs, les pays de cette Région, malmenés par de graves crises économiques et financières (Argentine, Venezuela) et très affectés par les conséquences de la pandémie de COVID-19, tentent de se rétablir et de se réorienter. La République Populaire de Chine devient un partenaire commercial de premier plan et un créancier majeur, aux dépens des États-Unis et de l’Union Européenne. En lançant cet appel à propositions, nous voulons entamer une réflexion collective sur des évolutions économiques et des processus de régionalisation qui posent de redoutables défis pour l’Amérique latine et les Caraïbes.
Thématiques
Les textes pourront aborder les thématiques suivantes en économie politique internationale et en géopolitique.
- Les accords commerciaux et les chaînes de valeur
D’une manière générale, les pays d’Amérique latine et des Caraïbes sont signataires de très nombreux accords commerciaux à l’intérieur de la Région. Pourtant, sauf exception, les volumes de commerce et d’investissements générés demeurent faibles en comparaison des autres accords commerciaux régionaux dans le monde. Il convient de noter deux points : d’une part le commerce extrarégional se développe plus rapidement que le commerce intrarégional ; d’autre part la Région peine à monter dans les chaînes de valeur, son positionnement traditionnel de fournisseur de matières premières et de produits agricoles pour les marchés mondiaux se trouvant même accentué avec le rapprochement avec les puissances asiatiques, le Mexique faisant figure d’exception. Il s’agit ainsi de faire le point sur les divers groupements d’intégration et de voir dans quelle mesure ceux-ci sont adaptés au recentrage de l’économie mondiale vers l’Asie. La ratification d’accords régionaux et extrarégionaux est-elle la voie à suivre ? Ou bien, compte tenu de la dotation des facteurs, est-il plus avantageux pour les pays de la Région de faire cavaliers seuls ? Quid de la capacité des États d’adopter des politiques commerciales et industrielles et de modeler le tissu économique national ?
- La géopolitique régionale et la Chine
La relation avec la Chine offre d’importantes opportunités économiques pour les pays de la Région (développement des infrastructures, prêts bilatéraux) mais elle présente aussi des risques car elle peut établir un nouveau rapport de dépendance (avec la destruction de secteurs industriels, l’endettement…). Pour la Région Amérique Latine – Caraïbes (ALC) la diversification des relations diplomatiques, qui permettrait en principe de rééquilibrer la dépendance traditionnelle avec les puissances occidentales, peut-elle apporter quelques bénéfices ? Comment les pays de la Région peuvent-ils gravir des échelons dans les chaînes de valeur et envisager de soutenir un secteur manufacturier et technologique dynamique chez eux ? Dans le même esprit, comment l’instabilité politique, la violence ou encore les crises sociales et les grands mouvements de population influent-ils sur l’attractivité des pays de la Région comme base de production et d’investissement ?
- Les petites économies nationales
On passe trop souvent sous silence que la Région ALC comprend de nombreuses économies de taille modeste. Outre le fait que l’on rencontre dans les Caraïbes insulaires, en Amérique centrale et dans les Guyanes des pays très petits et même des micro-États (plusieurs pays avec une population inférieure à 100 000 habitants, soit moins que des villes comme Poitiers ou Trois-Rivières), il convient de noter également la présence de pays enclavés et/ou relativement peu peuplés (Bolivie, Paraguay, Uruguay). De plus, les pays andins eux-mêmes affichent des PIB assez faibles, nettement inférieurs par exemple aux PIB de pays comme la Suède, la Norvège ou le Danemark. Seuls deux pays, le Mexique et le Brésil, membres du G-20, peuvent être considérés légitimement comme vraiment « émergents ». Des études de cas doivent permettre de mieux cerner les options disponibles pour les petites nations en termes de représentation et d’insertion internationale.
Comité de rédaction
- Mathieu Arès, Université de Sherbrooke
- Christian Girault, CREDA-CNRS, Paris-Aubervilliers
Échéancier
Proposition d’article (1 page) : 1er octobre 2023
Retour sur les propositions : 1er novembre 2023
Article complet : 1er février 2024
Évaluation en double aveugle : 1er février au 15 mars 2024
Retour aux auteurs/autrices
Retour des manuscrits finaux à la revue : 1er mai 2024
Sortie du numéro : Été/ automne 2024
Pour les consignes de mise en forme et d’édition de votre article, voir :
https://journals.openedition.org/interventionseconomiques/65
Pour plus d’information sur la revue
http://interventionseconomiques.revues.org/
Envoyez vos questions éventuelles, propositions et textes aux adresses suivantes :
Mathieu.ares@usherbrooke.ca & christian.girault@cnrs.fr
Pour consulter la version de l’appel en anglais ou en espagnol