Un rôle canadien pour la paix entre Israéliens et Palestiniens?

Point de vue diplomatique, 4 décembre 2023, François LaRochelle

La terrible tragédie qui se déroule sous nos yeux, au Moyen-Orient, a remis à l’ordre du jour la notion de la création de deux États, Israël et Palestine, vivant dans la paix, côte à côte. C’était l’objectif, jamais réalisé, des Accords d’Oslo de 1993.

Tout au plus ont-ils créé l’Autorité palestinienne, une structure de gouvernance avec des pouvoirs limités, circonscrits et localisés en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. En Cisjordanie, le territoire palestinien a été grugé graduellement par les colonies de peuplement et les impératifs sécuritaires israéliens. À Gaza, le Hamas a pris le pouvoir en écartant le Fatah.

Dans la foulée de la guerre actuelle, les Occidentaux ont soudainement redécouvert la nécessité de réaliser le rêve des deux États. Il n’avait pas disparu de leur discours politique mais n’était plus qu’un leitmotiv, sans réelle perspective de réalisation.

Jusqu’à l’attaque du Hamas en sol israélien, la priorité était de rapprocher Israël des pays arabes, notamment ceux du Golfe, pour faire contre-poids à l’influence iranienne. Les accords d’Abraham était le modèle à suivre. Les Américains essayaient de convaincre les Saoudiens de se joindre à ce mouvement.

Avec la guerre Israël Hamas, la question palestinienne est revenue à l’avant-scène des conflits à résoudre. Il est trop tôt pour prédire si cet appel à reprendre les efforts pour la création de deux États est sérieux ou un moyen de calmer le jeu pour éviter un embrasement régional.

La situation sur le terrain est beaucoup plus complexe qu’en 1993. Nul ne sait ce qu’il adviendra du statut de Gaza après cette guerre. Les colons israéliens en Cisjordanie reçoivent l’appui du gouvernement de Jérusalem et ont le vent en poupe. Les relations entre Israéliens et Palestiniens atteignent sans doute des sommets de haine et de paranoïa.

On peut aussi se demander si la campagne présidentielle américaine est le meilleur moment pour pareille initiative de politique étrangère. Néanmoins il est clair qu’une réflexion de haut niveau sur la recherche d’une solution juste et permanente au conflit israélo-palestinien se déroule actuellement.

Et le Canada, où est-il ?

La ministre responsable d’Affaire mondiales Canada, Mélanie Joly, parlait récemment d’une approche plus pragmatique de notre politique étrangère.

Est-ce qu’Ottawa est impliqué dans ces consultations internationales sur l’avenir de la Palestine? Est-ce que le gouvernement Trudeau veut aller au-delà des déclarations lénifiantes et des annonces d’aide humanitaire?

Il serait irréaliste de penser que le Canada prenne la tête d’un mouvement pour reprendre un processus de paix. Nous n’avons ni assez d’influence, ni les moyens financiers. Il ne s’agit pas de demander à notre Premier ministre de se prendre pour Lester B. Pearson.

Notre politique étrangère a pris de sérieuses inflexions pro-israéliennes depuis quelques années mais avec la présence d’une communauté arabe et musulmane mieux organisée, le Canada a des liens avec cette région qu’il pourrait utiliser positivement.

Nous avons développé une sensibilité différente dans ce dossier de celle d’autres de nos partenaires du G7, par exemple. Nos liens d’amitié avec Israël pourraient servir à convaincre les modérés du bénéfice pour la sécurité de faire des compromis pour la paix.

Dans le cadre d’Oslo, le Canada s’était vu confier un groupe de travail particulièrement sensible et important, celui des réfugiés. Le travail que nous y avions accompli avait reçu l’estime de toutes les parties. Bien des documents et des projets avaient été élaborés à l’époque. Pourraient-ils être remis à jour? Un rôle canadien concret contribuerait à diminuer les tensions que l’on constate présentement au pays entre ceux qui défendent Israël et les pro-Palestiniens.

La participation même réduite de notre pays dans une initiative de paix servirait de moteur à la réconciliation ici au Canada.

Ce n’est pas à dédaigner dans une société où les extrémismes gagnent du terrain. Encore faudrait-il que l’on veuille de nous bien sûr! Ce n’est pas évident actuellement. Mais qu’avons-nous à perdre?


Auteur

François LaRochelle est fellow de l’Institut d’études internationales de Montréal. Au cours de sa carrière de diplomate il a notamment été en poste à Damas et au Liban (1990- 1993) et affecté deux fois au Caire, entre autres comme Chef de mission adjoint (2003-2006). Il a occupé diverses fonctions à l’administration centrale à Ottawa, incluant au Bureau du Conseil Privé-Secrétariat de la politique étrangère et de la défense.

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