In Satan We Trust: activisme, laïcité et démocratie aux États-Unis
Jeudi 17 février 2022, 12h30-14h00
Résumé de la présentation
Fondé aux États-Unis fin 2012 par Malcolm Jarry et Lucien Greaves, le Temple Satanique est à la croisée entre satanisme, sécularisme et religion non-théiste, en plus de s’appuyer sur un activisme politique explicite en faveur de la séparation entre Églises et État. Il s’appuie sur une lecture non-théiste de la figure de Satan comme symbole de libre-pensée et de compassion, inspirée notamment des lectures romantiques et de La Révolte des anges (1914) d’Anatole France, en promouvant une « atheistic religion ». En utilisant le symbole de Satan et son esthétique provocatrice et en se positionnant comme religion dans la sphère publique, l’organisation souhaite contrer l’hégémonie du christianisme et assurer le respect d’un réel pluralisme religieux, qui prendrait en compte les récentes mutations démographiques et culturelles américaines. Son implication dans des actions légales en faveur de l’avortement, du pluralisme ou soulignant les collusions entre religion et politiques publiques ont fait la célébrité du groupe grâce à un fort impact médiatique. Le Temple Satanique pose ainsi la question de l’intégration des communautés marginalisées, comme la communauté LGBT+, les athées, ou la population des sans-religion, dans la sphère publique, à l’heure où elles deviennent des forces politiques potentielles. L’organisation pose également la question de la (re)définition de la notion de religion, puisqu’elle a été officiellement reconnue en tant qu’Église par l’IRS en 2019 et comme religion dans un jugement de 2021. L’enjeu de son intégration au cœur de la sphère publique américaine et de sa reconnaissance illustre également les problématiques contemporaines de la gestion de la diversité religieuse à l’aune des cristallisations, sinon des polarisations politiques et identitaires de la société américaine.
Conférencier
Mathieu Colin, Ph.D., Université de Montréal